Les stations de montagne ont connu des évolutions perceptibles liées au changement climatique, dont les manifestations sont nombreuses et diverses. De nombreux indicateurs comme la qualité de l’eau, la ressource en eau, la biodiversité, sont également affectés. Ces effets ont un impact économique, social et écologique sur les stations de montagne. Il faut donc anticiper ces effets en avant des perspectives nouvelles et des retours d’expériences sur de possibles évolutions pour l’économie des stations de montagne de demain. 

C’est pourquoi Green Cross France et Territoires (GCFT), avec le soutien de l’Office du Tourisme et la mairie de Courchevel, et l’Institut pour la Recherche de la Caisse des Dépôts, ont réalisé de juin 2021 à juin 2022 une analyse des effets économiques du changement climatique sur les stations de montagne. Les résultats de ce rapport viennent tout juste d’être publiés.

Selon la direction de l’office du tourisme de Courchevel, « ces travaux ont pour ambition de partager les effets du changement climatique en les rendant concrets sur le territoire, de mettre en valeur des pistes de solutions et les opportunités pour les stations de montagne, de partager les meilleures pratiques ».

Les effets du changement climatique sur les stations de montagne

Les conclusions du 6ème rapport du GIEC (août 2021 à avril 2022)

Le Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (GIEC) a publié le 09 août dernier un rapport d’évaluation présentant les connaissances les plus avancées et récentes sur le réchauffement climatique. 

Concernant la montagne, le rapport comprend différents points à retenir tels que les interdépendances entre le système climatique, les écosystèmes et les communautés humaines.

Il évoque également le besoin urgent de déployer davantage d’efforts pour s’adapter au changement climatique. Cela est particulièrement vrai pour les zones de montagne, où le changement climatique est à la fois plus intense et plus visible.

Ce rapport revient aussi sur l’impact sur les écosystèmes et l’activité dans les zones de montagne et les effets en cascade sur les vallées et plaines.

Enfin, il aborde et l’impact sur l’approvisionnement en eau des populations et des secteurs concernés. A titre d’illustration, 68 % des zones agricoles irriguées dans le monde dépendent des apports essentiels en eau de ruissellement provenant des montagnes.

Équivalent en eau du manteau neigeux

Le rapport évoque également que les mesures d’adaptation réussies impliquent les populations à répondre à leurs valeurs et préoccupations. Il met également en avant le fait qu’il faut aussi une meilleure gouvernance. En effet, cela permettrait de construire une cohérence et des stratégies d’adaptation ambitieuses pour les zones de montagne au-delà des frontières administratives.

Les indicateurs sur l’activité des stations

Selon l’Organisation Mondiale du Tourisme, l’augmentation du nombre de touristes internationaux ne s’arrêtera pas de croître dans les prochaines années. Dans la région Rhône-Alpes, la consommation des touristes était de 21 milliards d’euros en 2014 selon l’INSEE. C’est la principale source de revenus. De plus, plus de 115 000 emplois sont dépendants du tourisme dont 68 000 directement liés aux stations de montagne.

Station de ski de Courchevel

D’un point de vue énergétique, les consommations sont importantes à la montagne, notamment avec le chauffage. Selon l’ORCAE, en 2019, le secteur du bâtiment (résidentiel et tertiaire) est responsable de 22,5% des émissions de CO2 en région Auvergne-Rhône-Alpes. Sur la seule consommation de chauffage par exemple, un logement de 20m2 en station d’altitude consomme environ entre 3600 et 6000 KWh/an (contre 2400 à 3300 KWH en moyenne nationale).

Les transports représentent également une source de pollution car ils sont responsables de 35% des GES émis dans la région. Ce chiffre est dû au fait que 9 français sur 10 prennent une voiture pour se rendre en montagne l’hiver (enquête réalisée par l’ANMSM (Association Nationale des Maires des Stations de Montagne en avril 2022). 

Transport-voiture-ski
9 français sur 10 prennent une voiture pour se rendre en montagne l’hiver

De plus, une étude scientifique suisse, basée sur l’analyse d’images satellites des Alpes, a montré que le changement climatique avait provoqué une augmentation de la végétation de 80% de la surface des Alpes au-delà de 1700 m d’altitude, en 40 ans, ainsi qu’une diminution de 10% des neiges éternelles sur la même période. Ces zones deviennent des enjeux et aujourd’hui, 43% de la surface des massifs alpins est classée comme espace naturel protégé, 53% de ces massifs sont couverts de forêts et milieux semi-naturels.

Des critères de succès identifiés

Le rapport présente un certain nombre de succès identifiés permettant de mieux appréhender les effets économiques du changement climatique dans les stations de montagne.

Tout d’abord, les enjeux du changement climatique doivent être analysés de manière transverse, territorialisée et concrète. Pour ceci, dans la continuité du 6ème rapport du GIEC et des Objectifs de Développement Durable, Green Cross France et Territoires (GCFT) a structuré une trame d’analyse construite en 11 domaines regroupés en 3 pôles (Ecosystèmes, Activités, Rayonnement), qui semble efficace pour envisager la résilience des stations de montagne de manière décloisonnée.

changement climatique stations montagne
Une étude innovante par son périmètre d’analyse : 11 domaines regroupés en 3 pôles : écosystèmes, activités, rayonnement.

Par ailleurs, le constat tout comme la co-construction de plans d’actions doivent être effectués selon les échelles territoriales les plus pertinentes en fonction de chaque enjeu. La multiplicité des répartitions de compétences et de responsabilités opérationnelles selon les thématiques apparaît souvent faute de feuille de route cohérence comme un frein à l’action. Une réponse possible est via un observatoire en mode recherche-action. L’objectif étant de construire un consensus et de caler des priorités et pistes de solutions par commune / bassin / massif. Cela doit permettre d’être capable de mieux connecter les calendriers touristiques, sportifs et climatiques.

La rapidité des évolutions climatiques constatées, ainsi que les précisions apportées sur les évolutions à venir par le 6ème rapport du GIEC, incite à prendre en compte les enjeux liés à l’eau, au sol et à la forêt, à la biodiversité et à la qualité de l’air avec la même rigueur et le même sens des priorités que les enjeux carbone et climat. Le dimensionnement des infrastructures touristiques nouvelles ne peut plus raisonnablement être dimensionné par rapport au seul pic saisonnier. Il doit plutôt contribuer à développer et maintenir sur une période large une activité touristique diversifiée, où la durabilité et la relation avec le territoire sera un critère d’attraction essentiel.

Station de ski de Courchevel

Dans ce contexte, la compréhension des modèles éco-émergents, en particulier par un étalonnage régulier à l’international, permettra de mettre en avant prioritairement les bonnes pratiques inspirantes et les incitations à agir. Une innovation suscité et guidée
apportera de décrire, rassembler, trouver les meilleures pépites en appui de ces modèles et les faire changer de dimension.

Accélérer la prise de conscience

La mise en oeuvre de cet observatoire permettra également d’accélérer la prise de conscience à tous les niveaux. Cela passe par les visiteurs, les dirigeants des institutions et collectivités publiques ou les acteurs privés qui opèrent sur le territoire. Il fournira ainsi des outils pour anticiper au mieux les enjeux en termes de ressources humaines et d’impact sur l’évolution des métiers et des populations. Il pourra éclairer l’émergence de trajectoires cohérentes et de cohésions entre les différentes générations, stations, altitudes, vallées et secteurs d’activité.

Vue générale de Courchevel

Les conséquences du changement climatique pour les stations de montagne

De nombreuses conséquences du changement climatique sont aujourd’hui visibles dans les stations de montagne. 

Tout d’abord, des records de températures sont battus comme ce fut le cas au Col Major en juin 2022 avec une température de 10,4°C. Cela impacte forcément la qualité de l’air qui se dégrade dans les vallées.

L’eau devient également un sujet avec des enjeux importants. Il y a des incertitudes en haute montagne et dans les bassins qui versent les Alpes comme la gestion quantitative de l’eau mais également la gestion qualitative. 

Enfin, la biodiversité est également menacée par le changement climatique. Ces menaces proviennent de la pollution, de la qualité de l’air et des records de températures qui dérèglent les écosystèmes.