I Love Ski a rencontré David Ponson, Directeur du périmètre montagne et activités outdoor du groupe Compagnie des Alpes. Originaire de Saint Etienne, ce père de famille nous dévoile ses passions, sa vision et ses motivations afin d’amorcer le changement d’une montagne plus durable.
David Ponson, pouvez-vous nous présenter votre parcours professionnel ?
David Ponson : Je suis originaire de Saint Etienne. Ma formation d’ingénieur Arts & Métiers à Cluny puis Paris m’a permis de découvrir la Montagne et même d’y faire mon service militaire dans l’armée de l’air effectué à la station de Méribel (dans un centre de montagne air). Ces premières expériences m’ont permis de goûter aux plaisirs de la montagne et de m’y sentir bien. Après à un passage dans l’industrie, le président fondateur du groupe Compagnie des Alpes, Jean-Pierre SONOIS m’a proposé un poste sur Peisey-Vallandry (Les Arcs) et depuis, je suis resté dans ce Groupe.
J’ai eu un parcours et un apprentissage dans le groupe Compagnie des Alpes. Cela fait maintenant 10 ans que mon poste est basé à Chambéry, avec, dans un premier temps, un rôle de directeur des opérations des domaines skiables sur une partie du périmètre et aujourd’hui j’ai la charge et la responsabilité de l’ensemble du périmètre montagne du groupe Compagnie des Alpes. Cela comprend des sites d’exploitation de montagne, de ski, et d’autres activités outdoor complémentaires du ski.

Tout dernièrement, nous nous sommes rapprochés des écoles Évolution 2 qui sont des écoles de ski mais aussi des centres d’activités sportives outdoor qui comptent plus de 50 activités différentes. Cela nous permet d’avoir plus de diversité dans nos opérations mais aussi un certain apprentissage de ce que peuvent être les activités complémentaires au ski en montagne vis-à-vis de nos clients et ce, sur plusieurs saisons été comme hiver.
Quelles sont vos passions ?
David Ponson : Avant toute chose, je suis passionné par mes enfants. Il n’y a pas d’école ni de livres qui permettent de devenir un bon père, c’est eux qui m’apprennent le plus de choses en réalité.
Mes passions tournent autour du ski et de la montagne. J’ai pratiqué un grand nombre d’activités, comme le football en bon « stéphanois », puis des années de basket jusqu’à mes années étudiantes. Depuis je continue de faire du sport autant que faire se peut et notamment de la plongée et de la photo sous-marine, du rafting, du parapente, ou encore du VTT, de la moto et j’en passe. Bref des pratiques éclectiques, en groupe ou en solo !
Mes autres passions sont de faire des rencontres et des découvertes, notamment en ce qui concerne des nouvelles destinations de montagne ou la rencontre de nouvelles personnes.
La recherche et l’innovation fait aussi partie de mes passions. À la Compagnie des Alpes, nous sommes partis d’une copie blanche sur le sujet d’une dameuse bas carbone.

Aujourd’hui 87%, voire 90% de l’impact carbone lié à notre métier et notre secteur concerne le damage. J’avais très envie de traiter ce sujet, et de poser ma pierre à l’édifice. Nous avons développé en partenariat avec CM DUPON et les équipes CDA, un prototype de dameuse entièrement électrique qui a tourné cet hiver, et sur laquelle nous avions envie d’aller plus loin que le simple bilan carbone où l’on enlève le moteur thermique. En effet, nous avons décidé d’enlever aussi tous les fluides hydrauliques qui sont une source potentielle de pollution pour notre montagne. Nous sommes très contents des premiers résultats. C’est quelque chose qui est motivant et qui nous donne envie d’aller encore plus loin.
David Ponson, quelles sont vos motivations ? Pourquoi vous levez-vous le matin ?
David Ponson : Je me lève tôt le matin. C’est une habitude que j’ai depuis toujours, avec un grand-père qui me disait que le monde appartenait à ceux qui se lèvent tôt. Mais au-delà de ça, j’aime avoir l’impression d’une journée bien remplie, d’une journée dense tous les jours.
Ce qui me lève, c’est l’envie de faire plein de choses. J’ai la chance d’avoir un poste qui me permet, déjà, de rencontrer différentes personnes au cours d’une même journée et de traiter 1000 sujets différents. Je traite des sujets de marketing, de technique, de finances, de politique, de DSP (Délégation de Service Public), d’environnement… Je pense que ce qui me lève résolument tous les jours c’est tout cela, cette envie d’apprendre. Il ne se passe pas un seul jour sans que j’apprenne quelque chose de nouveau et cela me nourrit depuis ma plus tendre enfance. Tant que j’aurai cette envie d’apprendre qui me tire en avant, dans ce poste là ou un autre, je me sentirai vivant et je me sentirai avancer.
Quelle est votre plus grande satisfaction ou votre plus grande réussite ?
David Ponson : Il y en a plusieurs. Tout d’abord, une satisfaction en tant qu’homme vis-à-vis de mes enfants. Apprendre avec eux, leur donner les clés de compréhension de la vie et comment avancer dans ce monde qui bouge beaucoup, sur lequel nous avons peu de repères nous-mêmes alors que nous sommes censés leur en donner. Je veux leur donner les armes pour qu’ils affrontent positivement ces situations.
Puis, dans mon métier, dans mon rôle de manager, mes satisfactions sont de donner l’envie à nos équipes. Récemment, nous avons eu un séminaire de fin de saison à Chamonix, ce fut un moment génial. Nous nous sommes tous retrouvés pour débriefer de la saison, et en écoutant tous les bons retours des uns et des autres, cela nous permet de toujours être motivé pour l’année qui vient. C’est une grande source de satisfaction en tant que manager.

Quel est votre plus grand regret, s’il y en un ?
David Ponson : En tant que bon humain, j’ai tendance à voir et à retenir ce qui fonctionne le moins bien. Les regrets, j’ai appris à en avoir de moins en moins. Il fut un temps, j’en avais un certain nombre, qui remontaient en permanence à la surface. J’ai appris avec le temps à être en paix avec eux et à accepter que tout ne soit pas parfait et que certaines choses prennent plus de temps à s’installer que d’autres. Je me rappelle du proverbe chinois « wei-wu-wei » qui signifie « agir sans agir ». En y réfléchissant, il est vrai que nous faisons avancer beaucoup de choses en ayant l’impression de ne rien faire, comme le silence qui, parfois, est la solution au changement. J’ai donc appris à vivre avec ça, à aller de l’avant et je me porte beaucoup mieux.
Si vous aviez une liste de 3 voeux pour la montagne, quels seraient-ils ?
David Ponson :
- nous devons collectivement apprendre à sortir de notre zone de confort pour prendre définitivement le virage de notre modèle économique en Montagne et apprendre à faire moins mais mieux (formule empruntée et adoptée de Marc Halévy que nous avions fait intervenir à un de nos séminaire de fin d’année il y a 5 ans).
- apprendre à faire la démonstration par la preuve et le concret, non plus simplement par les engagements, et notamment en matière environnementale
- avoir une montagne unie et solidaire et dépasser les postures corporatistes et dogmatiques de notre milieu qui nous empêchent parfois d’avancer vraiment
- J’en ai un 4è : laisser une belle montagne préservée et embellie pour nos enfants 😊
David Ponson, comment voyez-vous la montagne de demain ?
David Ponson : Avant de répondre à la montagne de demain, il faut prendre du temps pour définir ce qu’on ne veut pas qu’elle soit, puis essayer de la mettre en mouvement. Nous sommes dans un écosystème incroyable mais qui a du mal à évoluer à cause notamment de nos habitudes, de la stabilité du business, du confort dans lequel nous sommes. Dans ces circonstances, nous essayons de mettre un peu en déséquilibre le système pour qu’il se pose les bonnes questions. C’est typiquement ce que nous faisons dans la recherche et l’innovation avec de développement de moyens pérennes.
Nous avons des sites de haute altitude avec notamment des glaciers qui perdent plus d’un mètre de glace tous les ans depuis 30 ans maintenant. Il est vrai que ces marqueurs nous ont permis de prendre conscience plus vite de l’ampleur de la situation et de porter des initiatives sur la mobilité, le damage et sur le développement de notre technologie avec le photovoltaïque et l’hydroélectricité. Même si certaines choses nous éloignent de notre métier de base, si nous pouvons contribuer modestement, à notre niveau, à ce changement, nous aurons réussi une partie de la mission.
Concernant la montagne de demain, il faut bien entendu la préserver car nous sommes dans un milieu particulièrement sensible au réchauffement climatique. Nous tenons beaucoup à notre montagne, nous sommes des passionnés. La valeur immatérielle que nous avons pu mesurer dans nos équipes, ce n’est pas celle des remontées mécaniques ni de tous nos actifs matériels mais l’engagement et la passion de nos collaborateurs qui habitent à la montagne et qui en vivent. Il faut que tout cela s’inscrive très durablement. Il y a plusieurs petites transitions dans la grande transition. Cela va prendre du temps mais finalement, c’est ça qui est le plus passionnant.