COVID-19 : La montagne pourrait-elle “(re)devenir à la mode ?
Les enjeux des destinations de montagne sont bien là : continuer d’attirer les voyageurs tout le long de l’année malgré une saison d’hiver stoppée le 15 mars et un contexte sanitaire difficile. Le Covid-19 pourrait-il permettre à la montagne de (re)devenir une destination à la mode ?
En cette période où le COVID est au coeur de l’actualité européenne et mondiale, les professionnels du tourisme subissent de plein fouet les conséquences de ce virus : fermeture des établissements, des stations de ski, limitation ou interdiction des déplacements, fermeture des frontières, suppression des liaisons ferroviaires, aériennes et maritimes.
Le COVID-19 est en pleine expansion mais cette situation devrait, et sera, à un moment donné contrôlée. Les conséquences sanitaires seront désastreuses, et les conséquences économiques également. D’un point de vue touristique, la corrélation est malheureusement très simple : à mesure que le coronavirus gagne du terrain, le tourisme recule.
Mais pour avoir une note d’optimisme dans ce contexte particulièrement incertain, de nombreux comportements touristiques devraient changer voire se modifier dans le long terme. La frénésie de la société liée en partie à la mondialisation des échanges, et l’hyper consommation devrait subir un fort ralentissement.
Une prise de conscience de l’impact de chacun d’entre nous sur la planète
Partir faire le tour du monde, s´évader au soleil en plein mois de février… voici quelques uns des comportements « courants » ces dernières années pour une certaine catégorie de la population. Une envie de dépaysement, d’évasion qui se traduisent par une consommation excessive de vacances, et une empreinte carbone des plus importantes.
En 2019, 10 stations de ski françaises ont réalisé leur premier bilan carbone, et après 14 mois d’analyse, les résultats ont démontré que ce sont les transports de personnes vers et dans les stations qui génèrent la plus grande partie des émissions de CO2, 57% au total. Le transport des visiteurs étrangers vers les stations, en voiture, en avion ou en train, représente 44% de ces émissions. Les déplacements des résidents permanents sont à l’origine de 37% des émissions liées au transport. Les déplacements des touristes français en représentent quant à eux 19% (étude menée par l’Association nationale des maires des stations de montagne –ANMSM– et l’Agence pour le développement et la maîtrise de l’énergie –Ademe-).
A l’heure du confinement et de la réduction (imposée) des déplacements, les effets sur la planète sont particulièrement visibles, notamment au niveau des points de pollution et plus particulièrement des émissions de CO2. Chacun d’entre nous peut malheureusement se rendre compte de l’impact environnemental qu’il génère sur le changement climatique.
Alors que des changements se percevaient déjà l’été dernier dans le comportement des touristes, l’épisode sanitaire du COVID-19 devrait confirmer le souhait des touristes de réduire leur empreinte carbone, en privilégiant le tourisme national et des modes de transport plus respectueux de l’environnement.
La destination montagne en progression depuis 2 ans
Dans son bilan de l’été 2019, l’ANMSM (Association nationales des maires de montagne) constate un taux d’occupation de 60% pour l’ensemble de l’été, soit 4% de mieux que l’an dernier.
Les deux dernières semaines d’août auraient même vu ce taux grimper à 10%, confirmant le glissement des vacances d’été vers le mois d’août (taux en attende de confirmation). « Ces chiffres très encourageants viennent confirmer ce que nous pressentions en début de saison, à savoir un retour en force de la montagne l’été », se félicite Charles-Ange GINESY, président de l’ANMSM. « Les températures caniculaires n’expliquent pas tout. Les stations de montagne récoltent les fruits de leur politique de diversification, avec de multiples activités ludiques et sportives pour tous les publics. Au-delà, la montagne répond aux aspirations des Français : plus de nature, plus d’authenticité, en famille et au grand air » (source : plateforme ANMSM/G2A)
Un retour à la nature
Qui, en cette période de confinement ne rêve pas depuis son balcon, de pouvoir profiter du spectacle du lever se soleil ? Ou de pouvoir se promener en pleine nature et de regarder l’arrivée du printemps et les bourgeons faire leur apparition ?
Les besoins des touristes évolueront de manière drastique, avec une nécessité de se retrouver et de se reconnecter avec la nature : observer un coucher de soleil, écouter les oiseaux chanter, observer des marmottes, gravir un sommet… Des choses simples pour des bonheurs plus simples.
Voyager et s’évader, oui ! Mais surtout voyager et s’évader moins loin et mieux.
La montagne est un terrain de jeu et de déconnexion privilégié, qui offre de grands espaces, des paysages changeant au fil des vallées, des traditions, des histoires d’hommes et de femmes… Des aventures et des expériences qui apportent un ressourcement dont tout un chacun a besoin, mais qui est souvent masqué par la vie, la routine, et la société de consommation qui nous entoure.
Privilégier la proximité et les circuits-courts
Le tourisme est synonyme de transport. Les modes de transports collectifs comme l’avion, le train, le bus sont aussi synonymes de confinement temporaire dans un espace limité. Une situation que peu d’individus vont souhaiter affronter pour leur déplacement de vacances. Le véhicule individuel et le co-voiturage devraient être privilégiés pour des déplacements plus courts. La montagne française et ses 6 massifs devront jouer la carte de la proximité. Un argument de poids qui devrait séduire de nombreux français en quête de dépaysement « de proximité ».
Les modes de consommation devraient également évoluer de manière radicale. De nombreux experts s’accordent à dire qu’il y aura un « avant » et un « après » COVID-19 (et en montagne aussi). Moins de surconsommation, moins de produits importés et une priorité donnée aux produits locaux et aux circuits-courts.
Élaborations à base de plantes, fromages, charcuterie,… sont quelques unes des richesses de la montagne. Des savoir-faire ancestraux souvent cachés au profit de l’industrialisation des process pour une production plus importante et surtout plus rapide.
La montagne, synonyme de slow-tourisme
La montagne est synonyme de slow-tourisme. Un concept qui se développe de plus en plus qui consiste à prendre le temps de découvrir une destination, d’apprécier les paysages, et profiter des expériences qu’offre cet environnement privilégié : observer un izard, organiser un pique-nique en montagne, observer accéder en altitude pour observer les couleurs d’automne, accéder à un lac d’altitude, pêcher, etc.
Devenir adepte du tourisme lent était déjà tendance en montagne, mais l’épisode du COVID-19 devrait venir renforcer ce phénomène auprès d’un public « obligé » à vivre moins vite, moins stressé.
Une approche plus authentique, qui permet de vivre au plus près de la population locale et d’en apprendre davantage sur elle. Le but étant de s’imprégner le plus possible du lieu que l’on visite, en évitant les bains de foule (tiens, ça ressemble au confinement!). Mais aussi de choisir des circuits moins empruntés.
A l’heure actuelle, les consignes de confinement obligent tout un chacun à retrouver (certes par obligation) le temps de prendre le temps.
Mais cette méthode imposée par le contexte sanitaire permettra t’elle de modifier certains comportements et de changer des habitudes de surconsommation ? La montagne est de loin l’un des cadres privilégié pour accueillir ces nouveaux slow-touristes !
Dans le cadre du plan de relance de la montagne post-crise COVID 19, les acteurs touristiques se devront d’appréhender ces changements de comportement. en mettant en avant ces destinations proches et des moyens de transports moins polluants. Une évolution déjà initiée vers une montagne 4 saisons qui prend chaque jour plus de sens.