Portrait de Jean-Henri MIR, un homme de valeurs et de terrain, et Maire de la commune de Saint-Lary Soulan (Hautes-Pyrénées) depuis 1991. Toujours très impliqué à l’échelle locale mais aussi nationale, il œuvre quotidiennement au développement de sa vallée et des stations de montagne. A maintenant 75 ans, il nous confie ses passions, et dresse un bilan de sa vie publique.
I love Ski : Pouvez-vous nous décrire qui vous êtes ?
Jean-Henri MIR : Je suis né à Saint Lary. J’ai aujourd’hui 75 ans. Mon parcours a été simple. J’ai eu la chance à l’âge de 10 ans de voir se développer la station village de ski de Saint Lary avec la construction du téléphérique. J’y ai vu la possibilité de m’impliquer dans le développement de ma commune.
En 1971, j’ai été élu avec Vincent Mir en tant que conseiller municipal puis adjoint. En 1990 je suis devenu Maire de Saint-Lary. Depuis j’exerce la fonction de Maire ainsi que d’autres missions d’investissement dans d’autres structures, que ce soit des structures de massifs ou des structures nationales. Je suis d’ailleurs trésorier de l’ANMSM (Association Nationale des Maires des Stations de Montagne) qui regroupe toutes les stations de montagne de France.
I love Ski : Quelles ont été vos motivations tout au long de ces années ?
Jean-Henri MIR : Ma motivation a été de poursuivre et maîtriser le développement de Saint-Lary tout en faisant en sorte de répondre aux besoins des touristes et de la population.
Mais comme ces fonctions ne font pas vivre, j’ai aussi eu un métier. J’ai été professeur d’éducation physique et comme j’aimais bien les complications, j’ai exercé aussi en tant que kinésithérapeute avec un cabinet sur Saint-Lary.
J’ai aussi eu une carrière de rugby intéressante puisque j’ai été international de rugby entre 1967 et 1968. Puis, j’ai petit à petit lâché certaines activités.
Cela a été plus facile pour moi de m’investir dans la fonction de Maire dès lors que j’ai été à la retraite (anticipée). J’ai pu me consacrer entièrement à la fonction d’élu et notamment depuis 2010, à la présidence de la Confédération Pyrénéenne du Tourisme. C’est une structure qui, à cette époque là, avait failli disparaître, et je voulais m’impliquer en jouant la carte de la solidarité et essayer de parler d’une même voix.
Photo : Jean-Henri Mir, joueur international de rugby entre 1967 et 1968.
I love Ski : Comment voyez-vous l’avenir des stations de montagne ?
Jean-Henri MIR : On le constate aujourd’hui : les stations de montagne sont confrontées à des problèmes de financement importants. Nous les avons assumé dans le passé avec certaines formes de cautions. Aujourd’hui certaines stations ne pourront plus seules investir. La question qui se pose est de savoir comment cet investissement peut se faire : la Région, les Départements s’investissent de plus en plus dans des syndicats mixtes permettant d’apporter des financements et des cautions.
Le département des Hautes Pyrénées se trouve dans une situation un peu différente de celle de ces voisins pyrénéens du fait du grand nombre de stations. Il est plus difficile pour lui département des Hautes Pyrénées de s’investir de la même manière que les Pyrénées Atlantiques, la Haute Garonne, les Pyrénées Orientales ou même l’Ariège.
C’est un modèle qui apportera une solution pour la pérennité des stations. Par contre, dans les Hautes-Pyrénées, nous devons encore la trouver.
I love Ski : Comment voyez-vous la gestion privée des stations de montagne, et l’exemple de Saint-Lary ?
Jean-Henri MIR : Il faut rappeler que les régies géraient l’intégralité des activités dans les années 1980. Puis on a différencié ce qui était purement culturel et sportif avec des déficits qu’il fallait équilibrer. Puis dès qu’il y a eu des outils économiquement rentables, on les a isolés sous formes de sociétés. En 1989, 90, 91, nous avons connu 3 saisons d’hiver sans neige. Nous étions « presque morts » et nous sommes restés près de 10 ans avec un suivi de la part de la Cour des Comptes.
C’est à ce moment là que nous avons lié un partenariat avec Altiservice. En 2000 nous avons pu faire une Délégation de Service Public concessive avec Altiservice et l’inciter à investir sur la station. Saint Lary a pu se remettre à jour financièrement et continuer à investir dans d’autres infrastructures notamment le thermalisme.
La question nous a toujours été posée de savoir pourquoi nous gérions la station de Saint –Lary en privé plutôt que de manière publique ?
Cela a souvent été une mise en accusation mais les chiffres parlent d’eux-mêmes. De 2000 à 2017, ce sont 70 millions d’euros qui ont été investis sur la station de Saint-Lary : 40 millions par Altiservice à ses risques et périls, et 30 millions par la collectivité (SIVU et commune de Saint Lary). Nous avons démontré que le partenaire privé pouvait être un partenaire efficace et qui a permis à Saint-Lary de devenir la station qu’elle est aujourd’hui. Même si aujourd’hui il faut poursuivre l’investissement.
I love Ski : Vous êtes actuellement Président de la Confédération Pyrénéenne du Tourisme. Pouvez-vous nous parler de cette structure ?
Jean-Henri MIR : Si on en dresse un bilan aujourd’hui, c’est une structure qui a failli disparaître. C’est grâce à la solidarité des stations qu’elle existe encore, car elles ont eu la volonté de la recapitaliser. Nous avons été soutenus par les départements et les régions. Il y a eu une vraie volonté politique de la sauver.
On m’a proposé d’être Président de cette structure et j’ai accepté car je savais que si je n’acceptais pas, la structure risquait de disparaître. C’était moi le plus investi et comme j’avais par ailleurs des missions nationales, c’était logique.
La structure a rétabli ce pourquoi elle était faite, à savoir la Promotion des Pyrénées l’hiver et l’été. C’est ce qu’elle fait aujourd’hui avec ses moyens qui sont limités.
Ce rétablissement fait que depuis 2 ans maintenant, la Région propose de créer un autre outil, une autre structure. C’est surement quelque chose d’ambitieux, mais l’avenir dira si l’implication des acteurs sera aussi forte qu’au sein de la Confédération. Ce sont de vraies questions. C’est un moment difficile aujourd’hui pour cette structure.
Aujourd’hui, la Région a décidé de l’avenir de la Confédération, maintenant nous exécutons. La Région va reprendre la main, avec un président qui émanera du Conseil Régional. L’outil va changer de nature. Est ce que les stations et les membres actifs vont y trouver leur compte ? Je l’espère. Certainement plus de force et de relations avec les CRT (Comités Régionaux du Tourisme). Je pense qu’il y a des choses à inventer pour être plus efficace. La montagne a toujours besoin de nouveautés.
Il y a aujourd’hui une volonté de la Région et de sa Présidente de créer une Agence des Pyrénées. Mais qu’adviendra t’il des stations et de leurs modes de gestion ? L’avenir le dira.
I love Ski : Quel est votre cheval de bataille ? Pourquoi vous levez-vous le matin ?
Jean-Henri MIR : Mon cheval de bataille, c’est agir ! Agir sous toutes ses formes. Je suis en train de me poser la question, si demain je ne suis plus élu, qu’est ce que je vais faire ? C’est une réflexion que j’aie aujourd’hui.
Jusqu’alors je ne me suis jamais posé la question quand je me levais le matin, j’avais toujours une motivation car j’allais toujours défendre quelque chose. C’est cette motivation qui m’a toujours animé. Je me suis toujours dit que si je perdais cette motivation, il fallait que j’arrête. Je ne l’ai pas perdu encore !!!
Photo : village de Saint-Lary (Hautes-Pyrénées)
I love Ski : Quel est votre plus bel accomplissement personnel ?
Jean-Henri MIR : J’ai été quelqu’un qui a toujours voulu faire ce qu’il voulait. Cela peut paraître très égoïste mais j’ai toujours fait ce que j’ai voulu. C’était quelque chose d’important pour moi.
J’ai toujours été soutenu, encouragé par ma famille, et en particulier par ma femme. J’en profite pour la remercier pour son soutien.
I love Ski : Quel est votre plus bel accomplissement professionnel ?
Jean-Henri MIR : Dans la vie publique, je me rappelle m’être présenté aux élections cantonales et avoir été battu. Je me suis vite rendu compte que je pouvais mieux m’exprimer en restant au niveau local, et m’impliquer dans des structures nationales. Je n’ai pas eu l’ambition d’être un conseiller départemental ou un député car j’ai fait le choix de rester Maire. Être Maire de Saint Lary, c’est une vraie entreprise et c’est extrêmement motivant. Nous avons plein de problèmes, « on s’emmerde » mais quand on avance, c’est une vraie satisfaction. On a toujours envie de faire quelque chose.
J’aurais pu professionnellement m’orienter vers la médecine. J’ai d’ailleurs fait une première année de médecine, mais je me suis vite aperçu que cela me privait de jouer au rugby. J’ai fait le choix d’un métier intéressant avec du temps libre, que j’ai gardé pour faire autre chose.
I love Ski : Où vous voyez-vous dans les prochains mois, les prochaines années ?
Jean-Henri MIR : C’est le gros point d’interrogation. Si je reste dans le schéma actuel, je repars en tant que Maire jusqu’a 83 ans et je meurs au poste. Ce n’est pas le schéma que je souhaite, mais ce n’est pas facile.
J’ai envie de penser un peu plus à moi, à ma famille, mes petits-enfants. J’ai envie de leur consacrer plus de temps que je ne le fais aujourd’hui. J’espère que cela me remplira de satisfaction.
De temps en temps, je me dis : « Tiens, je vais aller vivre 6 mois dans le sud de l’Espagne ou au Portugal et 6 mois à Saint Lary ». Pourquoi pas ?
Mais je ne me vois pas encore arrêter toutes mes missions. Ce sont des questions auxquelles je n’ai pas encore toutes les réponses.
I love Ski : Quelles sont vos passions ?
Jean-Henri MIR : Le rugby me passionnait en tant que joueur mais il me passionne moins. Je suis passionné de ski, et tout ce qui est en relation avec le sport, aussi bien en terme de pratiquant, qu’en terme d’observateur. Je suis ouvert à tout, tout m’intéresse, surtout quand il y a une relation humaine. J’aime me retrouver entre amis pour parler de sport, d’art, de musique. Je suis très ouvert à découvrir de nouvelles passions. Je me dis qu’avec plus de temps libre, je vais découvrir des choses que je n’ai pas eu le temps de découvrir aujourd’hui.
Mais je sais aussi que quand on évolue dans un environnement qui nous passionne, on peut difficilement appuyer sur un bouton et changer les choses.