Brexit, faillite du Tour Opérateur Thomas Cook, faiblesse de la livre sterling face à l’euro… L’incertitude politique qui plane sur le marché anglais inquiète les professionnels du tourisme. Mais qu’en est-il de la montagne française ?
Pour analyser ces phénomènes, et leurs éventuelles répercussions, I Love Ski a rencontré Jean-Luc BOCH, Président de France Montagnes, l’association en charge de la promotion de la France au niveau national et international.
Le poids du marché britannique sur la montagne française
En avril 2019, ForwardKeys, un analyste des données aériennes enregistrées via les GDS, déclarait : « les réservations estivales du Royaume-Uni vers les pays de l’Union européenne accusent un retard de 4,6% par rapport à l’année dernière. »
«Les réservations de l’UE au Royaume-Uni ont considérablement ralenti au premier trimestre de cette année », avait precisé Olivier Ponti, le vice-président de ForwardKeys, lors du sommet mondial du WTTC (World Travel & Tourism Council) qui s’était tenu à Séville.
Les touristes britanniques bouderont-il l’Europe et la montagne française cet hiver ? Quelles mesures concrètes sont prises pour essayer d’anticiper d’éventuelles pertes de fréquentation ?
Jean-Luc BOCH rappelle que « la clientèle britannique est une clientèle importante en France, notamment pour la destination montagne. Elle représente environ 20% de la clientèle internationale des stations. C’est un énorme volume de britanniques. Et pour certaines destinations, la proportion de britanniques est largement supérieure, notamment dans les grandes stations internationales où les britanniques représentent parfois plus de 50% de la clientèle internationale ».
Il est important de se demander dans quelle mesure la faillite de Thomas Cook impactera le ski ?
Pour le Président de France Montagnes, quelle que soit l’issue du Brexit (« Brexit Dur » ou « Brexit avec négociations »), la montagne française devrait se voir affectée par trois phénomènes.
3 effets majeurs du Brexit sur la montagne française
« Le premier point concerne l’impact financier et la dévaluation de la livre par rapport à l’euro. La vraie difficulté va être la perte de pouvoir d’achat des britanniques. Sur cette segmentation, ceux qui ont moins de pouvoir d’achat vont être directement impactés et ne pourront plus venir à la montagne. Ce propos est néanmoins à nuancer car les britanniques sont de fervents amateurs de la montagne européenne (française, autrichienne ou suisse). Ils ne vont pas arrêter de venir du jour au lendemain, ils n’ont pas de montagnes chez eux, et ils adorent le ski, la montagne sous toutes ses formes ».
« Le deuxième effet va, et a déjà concerné les résidences 100% britanniques dans lesquelles le réceptif était effectué par des personnels britanniques qui s’occupaient de leurs compatriotes. Ils travaillaient sous le droit britannique, donc ils avaient un gros avantage, en tous cas pour les Tours Opérateurs. Aujourd’hui c’est terminé. Ils sont obligés d’appliquer, sur le sol français, le droit du travail français. Cela devient déjà très problématique car ce modèle historique est en train de s’effondrer. Nous allons assister à une dégradation de l’offre pour les ressortissants britanniques qui viennent encore chez nous sous ce modèle économique ».
« Le troisième effet concerne le contrôle aux frontières. N’étant plus ressortissants européens, les britanniques auront une obligation de contrôle aux frontières quel que soit leur mode de transport (TGV, aéroports…) Nous allons devoir mettre en place des systèmes de contrôle simplifiés (cela dépendra de nos services d’état). Nous devons absolument leur faciliter la vie pour accéder à la montagne française et repartir chez eux, sans quoi nous risquons de perdre de nombreux britanniques au fil du temps. Car ce qu’ils aimaient était la simplification de leur parcours encore une fois ».

La montagne française sereine face à la faillite de Thomas Cook
Suite à la faillite du géant britannique, de nombreux opérateurs touristiques s’inquiètent. De nombreuses destinations touristiques ont été touchées de plein fouet par la banqueroute de Thomas Cook.
Quels sont aujourd’hui les impacts de cette faillite sur la montagne française ?
Selon Jean-Luc BOCH, « la situation est relativement simple puisque depuis 3 ans, l’opérateur ne programmait plus de destinations montagne, ou leur programmation était plutôt anecdotique. Thomas Cook était plutôt passé en mode retrait sur la montagne tout en poursuivant le développement de son modèle économique au niveau des destinations soleil et littoral ».
« La montagne française ne devrait pas subir de conséquences négatives et c’est fort heureux. Surtout qu’il s’agissait d’un gros producteur de vacances et un important opérateur historique depuis plus d’une centaine d’années. Nous sommes conscients que ce sera un vrai manque pour d’autres destinations mais pas pour la montagne française ».
Le produit packagé subira t’il le même sort que Thomas Cook ?
Le modèle économique de Thomas Cook était principalement basé sur la commercialisation de séjours packagés, des séjours tout compris incluant le transport, l’hébergement, les activités, etc. La faillite de Thomas Cook est-elle liée à son modèle ? Le produit packagé est-il devenu aujourd’hui obsolète ?
Jean-Luc BOCH le « voit bien au contraire comme un modèle d’avenir. Pourquoi ? Aujourd’hui, au sein de la montagne française, nous avons l’exemple d’un opérateur qui fonctionne sur la base de la commercialisation de produits packagés, avec des produits touristiques haut de gamme et luxueux. Il s’agit du Club Med ».
Le Club Med fait en effet partie des opérateurs les plus actifs au sein de la montagne française, avec des taux de remplissage souvent largement supérieurs au reste des hébergements en station. Une réussite qui pousse d’ailleurs le Club Med à proposer une nouvelle destination Montagne par an. C’est année, ce sera au tour de la station de la Rosière, en Tarentaise, d’avoir « son » Club Med.
« Au Club Med, tout est fait pour simplifier le parcours client et que le client se sente à l’aise du départ jusqu’à la fin, de la réservations jusqu’à son retour chez lui. Tout est fait pour qu’il soit dans un parcours ultra simplifié, ultra fonctionnel et qui lui permette de vivre une expérience sans presque aucune contrainte ».
