Aymerick Bonnot est responsable de Ascenso, une structure qui opère dans un environnement privilégié : la montagne. Elle offre ses services aux différents acteurs présents sur ce territoire : industrie de la montagne, Offices de tourismes, collectivités, remontées mécaniques, etc.
Le travail temporaire, le recrutement (principalement de cadres dirigeants), la formation et le conseil en Ressources Humaines sont le quotidien de cette structure. (Audit, bilan de compétences, Coaching, Teambuilding, séminaire, formation…)
SELON VOUS, POURQUOI Y A T’IL ENCORE SI PEU DE FEMMES À LA TÊTE DES STATIONS ?
Aymerick Bonnot : Aujourd’hui, les décideurs sont de plus en plus ouverts à avoir des candidates femmes, mais nous ne les avons pas. En tant que recruteur, nous avons très peu de femmes qui se positionnement pour des postes de cadres dirigeants. Ce n’est pas à la sélection des candidats qu’il y a un blocage, c’est plus à l’attrait du poste.
Il faut reconnaître que plus la station est petite, et plus le directeur se doit d’avoir des compétences techniques pour encadrer ses équipes. Nous avons de vraies difficultés à trouver des femmes qui ont ces compétences techniques. A l’inverse, pour les grandes stations, nous pourrions nous permettre d’avoir des femmes à ces postes-là. Par exemple, nous avons dernièrement recruté le(a) directeur(trice) de Courchevel, et une seule femme s’est positionnée
Lorsque nous recrutons des cadres dirigeants pour des grandes stations, la compétence technique n’est pas toujours exigée, cela est un plus mais n’est pas rédhibitoire selon les projets.
Je pense que l’image de la montagne et de ses métiers dessert sa féminisation : nous restons encore avec l’image que la montagne est rude, que les rythmes de travail sont intenses, qu’il faut manager des équipes masculines peu ouvertes à être dirigées par une femme.
AYMERICK BONNOT, QUE PEUT-ON FAIRE POUR CHANGER CELA ?
Aymerick Bonnot : Je pense que le blocage à la féminisation des domaines skiables est avant tout lié à l’imaginaire. De nombreuses femmes pensent encore : “c’est un métier d’hommes, qui a une affinité avec la technique, alors ce n’est pas pour moi ».
Nous avons aujourd’hui un problème de communication sur ces métiers. Il pourrait très bien y avoir des femmes à des postes de dirigeantes, mais on leur demande d’exister, de s’imposer dans un milieu masculin, et de se positionner comme des femmes dures. Elles doivent poser de grosses limites, dans un milieu qui n’est pas aidant. Et une fois qu’elles y parviennent, on leur reproche parfois d’être trop solide ou trop forte. C’est un vrai blocage.
J’ai très peu de candidatures féminines pour des postes de cadres dirigeants. Actuellement, j’ai 2 ou 3 candidatures de femmes mais qui sont loin du secteur, et pour un décideur, c’est un cumul d’inconnus. Il n’y a pas ou peu de femmes qui sont issues du milieu. Les femmes sont conscientes de la réalité et se posent la question de savoir si elles souhaitent affronter cette situation et si cela en vaut la peine ? Sans parler de la rémunération.
AYMERICK BONNOT, QUELLE VALEUR AJOUTÉE PEUT APPORTER UNE FEMME DANS UNE STATION DE SKI ?
Aymerick Bonnot : Les femmes apportent un équilibre évident aussi bien au niveau de la communication, que de la manière de percevoir les choses et de les aborder. Elles ont une grande ouverture d’esprit et ne sont pas enfermées dans un projet technique au départ. Leur sensibilité client, famille est indéniable.
Les femmes sont perçues comme très dures au départ, mais il y beaucoup de bienveillance qui ressort après quelques temps, et c’est un plus pour les équipes.
Quand il y a une femme, les hommes vont tester les limites, mais ils vont lui laisser une chance car elles sont très peu nombreuses dans le milieu.
Lorsqu’il y a une femme dans ce milieu, elle n’a qu’une obligation : celle de réussir ! Les femmes travaillent souvent bien plus que n’importe quelle personne. Elles n’ont pas le droit à la moindre erreur. Ces personnes s’imposent un rythme de travail qui n’implique pas de doute. Ce sont des personnes très fiables, qui apportent souvent une sécurité à l’entreprise ; l’intégration est une phase primordiale à ne pas rater.
À lire aussi…